Historiquement, le besoin de garde d’enfants a pris son importance lorsqu’au début du XXe siècle, les hommes sont partis à la guerre et les femmes devaient travailler pour subvenir à leurs besoins familiaux. Aussi, c’était nécessaire pour le bien-être économique du pays.
Les mères demandaient à des membres de leur famille, à une amie ou à une voisine de garder leurs enfants. Rien d’exigeant, simplement pour s’assurer que les besoins primaires des enfants étaient considérés : manger, boire, dormir et en sécurité.
Dans les années 40, de plus en plus de femmes sont allées sur le marché du travail, il devint plus difficile d’avoir une voisine ou une amie pour s’occuper de son enfant. De là, a commencé la pression des femmes auprès des gouvernements pour qu’il y ait des garderies communautaires, comme on les connaît aujourd’hui, ainsi que des lois qui les réglementent et qui les encadrent.
Mais toujours est-il que c’était très élémentaire comme service de garde.
Vers les années 70, la pédagogie commence à prendre sa place car des collèges proposent des programmes en éducation des petits menant à un diplôme sur le développement physique, cognitif, langagier et socio-affectif de l’enfant, des activités pédagogiques, comment répondre à ses besoins de base afin de l’aider à s’épanouir, à développer des habiletés, avec la philosophie que l’enfant apprend par le jeu.
Malgré ce changement de paradigme dans la formation des professionnels et de la livraison des services, les mentalités n’ont pas beaucoup évolué jusqu’à ce jour. On continue de considérer le personnel éducateur comme des gardiens ou des gardiennes d’enfants, une profession parfois méprisée et pas toujours valorisée.
Et pourtant, si la société savait l’importance du personnel éducateur dans la vie des jeunes enfants, la mentalité changerait, car « Tout se joue avant six ans. » * Et vers un an, les poupons sont dans nos centres éducatifs où le personnel éducateur œuvre à développer leurs intérêts, leurs passions, leur goût de l’aventure, leur curiosité pour découvrir ou apprendre sur le monde qui les entoure. Le personnel les encourage à se surpasser, à vaincre leurs craintes ou leurs peurs, à aller plus loin, car ils sont compétents et capables.
Ayant étudié la psychologie de l’enfant, le personnel éducateur de la petite enfance les accompagne, étape par étape, dans leur développement afin d’atteindre leur plein potentiel.
Sur le plan socio-affectif, l’enfant est écouté, ses sentiments et ses émotions sont pris en considération et aussi, on le console et on le cajole. Il est appuyé dans la résolution de conflits et on l’aide à bâtir des relations positives avec ses pairs. Cognitivement, l’apprentissage des couleurs, de la littératie, de la numératie et des sciences se passe à travers le jeu et ainsi, il découvre le monde naturel et apprend à le respecter.
Dans son ingéniosité, le personnel éducateur amène l’enfant à avoir confiance en soi, à développer sa résilience.
C’est plus que des gardiens et gardiennes, ce sont des éducateurs et des éducatrices, des bâtisseurs et des bâtisseuses de la société de demain
Nous travaillons dans des centres éducatifs et nous sommes des éducateurs et éducatrices de la petite enfance.
Quand on prend le temps de connaître et d’analyser les rôles et les responsabilités d’une éducatrice ou d’un éducateur œuvrant auprès des enfants, on est loin des gardiens et des gardiennes.
Dans les années 90, les collèges de langue française ont changé le nom du programme pour Garde éducative à l’enfance dans le but de mettre en évidence l’éducation que nous faisons auprès des enfants.
En 2007, l’Ordre des éducateurs et éducatrices a vu le jour avec son code de déontologie dans le but de reconnaître la profession. C’est pas mal, car on est assis sur le même banc que les médecins, les infirmières et les enseignants et enseignantes. Un Ordre, « Il y a de quoi se péter les bretelles! » Malheureusement, aucun changement dans le langage et la mentalité.
En 2014, est sorti le Comment apprend-on? La pédagogie de la petite enfance en Ontario.
Selon moi, s’il y a pédagogie, il y a des professionnels qui l’appliquent. Car dans le Comment apprend-on?, on parle de la documentation pédagogique qu’on partage avec les parents au sujet de leurs enfants, grâce à des observations qui aident à planifier des activités selon les besoins et les intérêts de l’enfant, tout ça dans un milieu bienveillant, selon le code de déontologie.
Encore une fois, le titre du programme change pour “Éducation en service à l’enfance”. Dans la communauté de la petite enfance en Ontario, certains décident d’enlever le mot « Garderie » de leurs panneaux d’affichage pour le remplacer par centre ou service éducatif, car le mot “garderie” est perçu par plusieurs comme trop péjoratif et non-valorisant pour la profession d’éducateur ou d’éducatrice.
Dans le domaine même de la petite enfance, on commence à changer le langage, mais même pour nous, éducateurs et éducatrices, il n’est pas évident de dire “centre éducatif”; on espère qu’avec le temps, on entendra surtout des mots tels que “centre ou service éducatif” de la bouche du personnel formateur, éducateur, des parents, des familles et de la communauté.
Pour être honnête, tout changement prend du temps et de l’éducation. (Moi-même éducatrice militante et formatrice, il m’arrive de dire souvent garderie quand je parle. Heureusement que mes collègues me ramènent par leur réaction sidérée : « Qu’est-ce que tu viens de dire, Myrlande? ». Et puis, je me rends compte de mon erreur et je me corrige : « Oh! Centre éducatif. »)
Gardons l’espoir…
Nous avons besoin de vos commentaires au sujet de nos outils de communication sur le secteur de la petite enfance.