J’ai grandi à Hearst, une communauté du nord de l’Ontario composée presqu’à 95 % de francophones. J’ai fait toutes mes études en français jusqu’au niveau universitaire dans cette communauté. À la radio, l’animateur était francophone, on avait notre journal francophone, notre librairie francophone. À l’extérieur, dans la cour de récréation, je me souviens qu’on se parlait en français. On ne connaissait pas autre chose!
Quand j’ai déménagé à Sudbury pour terminer mes études postsecondaires, j’ai eu un choc culturel, mais sans trop me perdre. Sudbury est assez francophone mais j’ai dû apprendre à me débrouiller en anglais à plusieurs reprises pour bien m’intégrer : au travail, à l’épicerie, au dépanneur du coin ou au restaurant.
C’est lorsque je suis arrivée Wawa pour le travail, petite communauté majoritairement anglophone du nord de l’Ontario, que mon identité francophone a été ébranlée. Je me souviens que, presque partout autour de moi, ça se passait en anglais. Un partenaire communautaire m’avait donné sa carte professionnelle et m’avait invitée à lui téléphoner au besoin. Je n’avais même pas compris son rôle, comment il pouvait m’appuyer, mais j’étais trop timide et dépourvue pour lui demander de l’aide. C’était un peu difficile, ayant moins de repères, dans un milieu qui me ressemblait moins.
Tentant de m’intégrer, je pouvais quand même compter sur un petit milieu francophone grâce à mon emploi. Par la force des choses, j’ai commencé à m’intégrer, à ouvrir mes horizons vers cette culture que je connaissais moins. C’était toutefois difficile, au début, de m’exprimer réellement sur mes états d’âme, mes émotions, mes pensées. Je sentais que j’étais loin de moi, que les gens n’avaient pas tous la vraie Geneviève devant eux, puisque je n’arrivais pas à partager ce que j’étais vraiment dans cette deuxième langue.
À travers ces mélanges d’émotions et de recherche d’un nouvel équilibre, je me suis imprégnée de l’humour anglophone qui est différent, du sentiment d’appartenance communautaire qui est fort chez les anglophones, etc.
C’est après ce petit cheminement d’adaptation que j’ai suivi le programme FrancoFUN offert par l’AFÉSEO depuis plusieurs années maintenant. Je me souviens qu’à travers les discussions avec d’autres francophones en petite enfance, j’ai réussi à faire les liens de mon parcours dans ma construction identitaire. Des prises de conscience qui frappent et qui restent dans le temps. À tous ces changements intérieurs que j’ai vécus pendant des années et qu’il était difficile pour moi d’expliquer. Les réflexions ont permis de me retrouver, de me reconstruire comme francophone désormais bilingue, de faire de la place pour la diversité sans perdre de vue qui je suis.
À la fin du programme FrancoFUN, on nous a invités à illustrer notre cheminement ou nos pensées, que je vous présente ci-dessous.
J’y joins également un poème.
Perdue, naïveté ébranlée,
Un petit bout de moi écorchée.
Reconstruire ma francophonie propre à moi,
À travers les expériences et le temps.
Prises de conscience qui restent,
Qui fessent!
Ouverture sur la diversité, désir de connaître l’autre,
Sans se perdre de vue.
Continuer de partager ma fierté francophone,
Pour ne pas perdre mon essence profonde.
C’est comme une danse qui s’installe,
L’équilibre revient.
Je me redécouvre,
Fière de la personne francophone devenue !