Mélanie Couturier, EPEI – Facilitatrice pédagogique, CEF
Je manque de temps.
Je voulais le faire mais je n’ai pas eu le temps.
J’ai pas assez de temps pour tout faire.
Les parents sont pressés, ils n’ont pas le temps.
Nombreux sont les discours comme ceux-là en petite enfance (et partout autour de nous). Trop nombreux à mon goût. Manquons-nous réellement de temps ou avons-nous créé une culture pressée, rapide avec un horaire trop chargé ?
Le temps, comme tel, n’a pas changé à ce que je sache, il y a encore 24 heures dans une journée. Pourquoi avons-nous donc l’impression de manquer de temps ? Dans notre rôle auprès des enfants et des familles, de quelles façons contribuons-nous à entretenir ce cycle vicieux ? Comment pouvons-nous en sortir ?
De plus, en tant que membre d’une société, si nous avons un rôle à jouer pour prendre conscience de notre manque de temps et du besoin de ralentir, je crois que notre rôle est doublement important auprès des enfants et des familles. Prendre conscience de notre propre horaire chargé est une première étape. Combien de temps est-ce que je consacre à ce qui est réellement important dans mon travail quotidien ? Faire le ménage ou passer plus de temps de qualité avec les enfants en m’impliquant dans le jeu physiquement et mentalement. Me dépêcher pour habiller les enfants le plus rapidement possible avant le jeu extérieur ou prendre le temps de vivre l’apprentissage avec les enfants, une botte à la fois, une fermeture éclair à la fois. Le choix nous revient.
Réfléchir à nos priorités dans notre pratique quotidienne nous permet de reprendre contact avec ce qui est réellement important dans notre belle profession : les relations et les liens que nous bâtissons avec les enfants, les familles, nos collègues et la communauté.
Nous vivons dans une société de surconsommation et de productivité à tout prix. Et si nous devenions des co-apprenants avec les enfants pour sortir de cette course folle contre la montre ? Les enfants eux, savent vivre le moment présent et profiter au maximum de chaque minute. Par exemple, le fait d’aller faire une promenade à l’extérieur avec un bambin. A quoi ressemble cette expérience pour l’adulte ?
On s’habille, on part en direction de notre destination et on revient sur nos pas jusqu’à notre point de départ. Voilà! La promenade santé est terminée.
A quoi ressemble cette expérience pour le bambin ?
« Un adulte me dit qu’on doit enfiler nos vêtements chauds pour aller dehors. On se dirige dans le vestiaire, je touche tous les manteaux pour essayer de trouver le mien. Je le connais le mien, il est tout doux à l’intérieur et il sent bon. En passant, j’accroche quelques vêtements et ils tombent par terre, je trouve ça comique de voir les manteaux tomber, il font un drôle de bruit lorsqu’ils touchent le sol. Je m’amuse à en faire tomber quelques autres et à marcher sur les manteaux. Ils sont douillets et tout chauds pour mes petits pieds. L’adulte me demande d’enfiler mes bottes. En me penchant pour déposer mes deux bottes par terre, je vois le monde à l’envers entre mes jambes. C’est drôle: tout est différent sous cet angle. Je tourne de l’autre côté pour mieux voir et un objet, sous les casiers, attire mon attention. Je me couche à plat ventre pour voir plus loin. C’est un objet brillant et je veux le toucher. J’étire mon bras sous le casier, alors que l’adulte me dit : “Lève-toi, tu vas être tout sale et viens mettre tes bottes.”
Je vous laisse deviner le reste de l’histoire. Clairement, on peut voir la différence entre le concept du temps de l’adulte qui se concentre sur l’objectif à atteindre, (dans ce cas-ci, la destination) et l’enfant qui vit le moment présent, sans même penser à la minute suivante. Quelle leçon peut-on tirer de cette histoire ?
L’enfant sait naturellement profiter des petits bonheurs du quotidien, devenons observateurs de notre gestion du temps et retrouvons, petit à petit, les petits bonheurs de vivre le moment présent. Prendre le temps de prendre le temps ça s’apprend !
Et vous, comment comptez-vous vivre le moment présent dans les jours qui viennent?